La rage de vaincre

 

 

    Et j’avançais sur ce chemin sans fin comme un bateau ivre chaloupant sur une mer  tourmentée. Je  m’accrochais  alors avec courage  à ma volonté de vaincre ces éléments  déchaînés qui tentaient une fois encore de me mettre ventre à terre ! Dans cet environnement animé  d’une rotation étrange mais quasi permanente, mon visage habituellement rosi  par  l’air vivifiant  perlait de gouttelettes,  virant au  teint laiteux. Mon corps lui devenu lourd comme ces arbres penchés à la mine consternée,  s’anémiait pas à pas sous le poids de mes peurs. Au grondement du vent se mêlaient mes soupirs, les tremblements des arbres,  les battements d’un cœur déjà bien au galop. L’automne perdait soudain  ses couleurs chatoyantes, son velouté si doux  et  gisaient sur le sol des feuilles agonisantes,  qui crissaient sous mes pieds  disant d’une même voix « N’y va pas ! »

 

     Mais quelque chose en moi ne se résignait pas !  Restée suspendue  au haut de la falaise depuis plus  de tente ans, l’enfant que j’étais  me  prit soudain la main  et la rage de vaincre ne m’abandonna pas ! Alors… Telles des guerrières  préparant leur assaut,  nous redressâmes le torse,  regardant dans les yeux  les cimes enneigées de ces montagnes austères qui semblaient nous toiser. Nos pas se firent plus sûrs et nos cœurs tout d’un coup devenus plus vaillants  foulèrent  enfin le sol  sans jamais désarmer comme si  quelque chose nous poussait par l’avant et au-delà du vide.

 

    Devant le précipice nos corps ne tremblaient plus et des heures durant nous pûmes savourer toute la magnificence de cet amphithéâtre, ce joyau de beauté  que la frayeur d’un jour nous avait occulté !


   A la tombée du soir,nos mains se séparèrent sans ne rien regretter. Le présent, le passé s’était  réconciliés la peur cette fois avait été vaincue et nous avions gagné !

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